La métamorphose des cloportes
On l’a tous vécu. On y est tous passé.
Cette fameuse nuit, cette étrange soirée qui fait de nous des hommes (ou des femmes, si tu pisses assis). Cette soirée qui pue l’été à plein pif. Ces flammes gigantesques qui embrasent tes cahiers, tes bouquins d’histoire, tes stylos à la con, tout ! Ta putain d’année scolaire brûlant dans un immense feu de joie. Ce fameux soir où tu balances ton sac cradingue aux orties. La soirée d’adieu de l’enseignement secondaire et le pot d’accueil de l’enseignement supérieur.
La nuit de tous les dangers, mon pote !
On dit au revoir à ses vieux amis, ces copains qui te suivent depuis la primaire, avec qui on a grandi, avec qui on s’est battu, avec qui on s’est marré. Ces potes qui ont allumé ta première clope, ton premier bédo, qui ont débouché ta première bouteille de pinard et qui t’ont aidé à la vomir. C’est ces mecs-là que t’abandonnent. Ces mecs qui se cassent en Lettres, en Langues, en Sciences, en BTS bidule ou même en Psycho comme une vulgaire gonzesse dépressive. Ces potes qui te laissent le cul par terre, les yeux plein de brume et ton enfance au fond de la poche comme une vieille pièce de monnaie usée par le temps.
Alors cette soirée mec, tu ne vas sûrement pas la louper.

Surtout que ce soir on a fait le plein à la casbah d’une quelconque connaissance en or massif. Et que t’es invité ! C’est rempli à ras la gueule d’alcools en tout genres: De la binouze à 18 degrés pour les créteux du coin au rosé pamplemousse pour pucelles au foie en rodage. Des produits stupéfiants franchement stupéfiants : de la boulette de Teuteuh d’Abdel les yeux rouges aux champis psychotropes made in bouses de meumeuh Aveyronnaise, en passant par les ecstas bondissants du grand frère de ton meilleur pote.
Pleine à craquer, la casa !
Sans parler du panaché de meufs « United colors of Benetton » qui viennent chercher la même chose que toi. Des petits paniers garnis à ras bord de dentelles fines et de phéromones parfumées au patchouli qui se trimbalent en sautillant devant ton pif aux aguets. Ces filles prêtes à toutes les conneries, à tous les excès, lâchant la bride à leurs envies et faisant péter ce putain de sous-tif beaucoup trop serré. Une soirée d’essai. Une nuit pour du beurre avant de se racheter une personnalité toute neuve, un petit air trop sérieux à promener dans les amphis de Psycho surchargés.
C’est LA soirée de ta jeune vie ! Celle qui te fera rentrer du côté des grands. L’adieu libérateur et goguenard fait à ton enfance au milieu d’un bol de punch surdosé en rhum et un épais nuage cannabique.

C’est cette soirée que Seth, Evan et Fogell alias McLovin ne veulent rater sous aucun prétexte. Se dépuceler avant de rentrer à l’université, comme le rite adolescent suprême, le passage d’un monde à un autre. Mais pour passer dans la galaxie des dépucelés, passer du monde des croyants à celui des pratiquants, il faudra déjouer les pièges de la morale castratrice, de ces couillons d’adultes puritains et de deux flics complètement rincés.
Trois ados, trois individualités, trois façons différentes de regarder sous les jupes des filles.
Une fable trash et bas du front, un humour qui frappe fort sous la ceinture et qui tâche le slip. La délicate transition de l’enfance à l’âge adulte détruite à grands coups de masse et broyée au rouleau compresseur. Le doux romantisme de la première fois tant redouté est jeté en pâture à la grossièreté assumée du gros Rogen. La Apatow Team investit le Teen Movie et lui fait pousser du poil sur les couilles.
La tranquille métamorphose de la chenille aux genoux cagneux et à la libido tourmentée en Papillon boiteux, aussi con que la veille, mais un peu moins puceau.
Ze Big Nowhere
