Il n’y a qu’un génie comme Osamu Tezuka pour imaginer telle situation : vedette pop masquée en permanence, Nagisa Harumi se voit huée par le public le jour où elle montre son vrai visage. Désespérée, elle émarge chez Monzen, jeune réalisateur aux dents longues récemment viré par son studio de télévision. En plein direct, l’homme s’est amusé à passer un programme érotique expérimental. On croit avoir affaire à un artiste un peu fou, attachant. Or le bonhomme souhaite tant se refaire qu’il exploite une faille méconnue de sa nouvelle protégée. Il se trouve que lorsqu’on l’affamme, Nagisa Harumi se transforme en jeune femme à la beauté sans pareil.
L’idée est à la fois drôle et cuelle dans son rapport au corps et la beauté. Au coeur de la satire attendue des médias, Osamu Tezuka cisèle un vaudeville ubuesque où les apparences priment sur tout. Au bord du malaise, la chanteuse répond tant bien que mal aux exigences du producteur, qui lui saute dessus et la réprimande dès qu’elle a le malheur de s’approcher de la nourriture. Le duo va de Charybde en Scylla, sans compter que le mangaka Otohiko Yamabe, l’amoureux de la jeune femme (la vraie, l’ordinaire) développe après un accident la capacité de provoquer des hallucinations collectives. Baptisé Diletta, cet autre monde transformé en arme médiatique complique un peu plus la vie du trio.

Moins abouti que le génial L’Homme qui aimait les fesses, La Grande pagaille du Diletta mixe humour cruel et fantastique avec la bonne humeur d’un sale gosse, symbolisant l’absurde course au sensationnalisme par un siège de WC gigantesque en guise d’antenne de transmission. Tant de bon goût dans le mauvais goût, c’est la marque des plus grands! « Le contexte social a beaucoup changé depuis que ce livre a été écrit, c’est pourquoi nous souhaitons avertir le lecteur que certains dialogues ou situations, qui allaient de soi à l’époque, pourraint être mal comprises aujourd’hui », nous avertit-on. Tezuka Productions ont-ils si peu confiance en leur lectorat pour le croire incapable de discernement, surtout face à un récit à ce point fantaisiste?
Guillaume Banniard
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