Il était une fois Palilula

«A l’époque du tournage en Roumanie, j’étais étudiante en alternance en France. Je n’ai fait qu’une seule visite sur place. Je me souviens d’une immense boîte frigorifique à la place d’un vrai studio, où on ne tournait que la nuit car toutes les vitres étaient cassées, où la lumière était incontrôlable. Il faisait un froid polaire, pourtant personne n’est tombé malade – l’eau de vie et le vin chaud clandestin ont dû aider. »

L’anecdote relatée par Cristina Purcărete, fille du réalisateur de Il était une fois Palilula, en dit long sur l’esprit du long-métrage. Dans un décor superbe mais rude, coupé du monde mais très peuplé à l’image, le cinéaste aligne les moments de vie chaotiques, déconnectés en surface les uns des autres mais liés par la folie douce de ses personnages.

En l’occurrence, Serafim, jeune diplômé de la fac de médecine, est amené à prendre ses quartiers à Palilula, ville reculée de la Roumanie des années 1960. Un lieu dépourvu d’enfants où l’on trouve pourtant une maternité, en fait un bâtiment peuplé d’ivrognes! L’inattendu, Il était une fois Palilula s’en fait un devoir, quitte à accumuler les idées plutôt que d’en faire le tri.


Chaque partie du monde a son totem. Faites un film sur la mafia italo-américaine, la comparaison avec Scorsese sera inévitable. Signez un film burlesque en Europe de l’Est, et l’ombre d’Emir Kusturica se fera sentir. C’est cette dernière qui plane sur l’ambiance exaltée qui parcourt Palilula, sans pour autant étouffer la voix de ses créateurs. Aux prises de vues mouvementées de Kusturica, Silviu Purcărete préfère des travellings latéraux équilibrés, de longs mouvements de grue – tout, en fait, pour mettre en valeur le décor et la lumière, loin de la spontanéité crue, indomptable, du Temps de Gitans.

Daté de 2012, Il était une fois à Palilula sort sur les écrans français en 2022 grâce à ED DISTRIBUTION. L’éditeur persiste avec un DVD au pressage impeccable, accompagné d’un entretien avec l’équipe du film dont son réalisateur Silviu Purcărete : « J’ai évidemment ressenti une terreur formidable liée à la fatigue et aux conditions très rudes dans lesquelles on a tourné, mais aussi le plaisir extraordinaire qu’on a face à un immense jouet ».

Difficile de rendre compte plus justement du trop-plein de ce film-univers réjouissant, où la couleur de peau est aussi changeante que l’identité sexuelle, et dont les 2h20 débouchent sur une résolution aussi cruelle qu’apocalyptique.

Guillaume Banniard

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